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Vendre ou acheter un logement en cours de divorce

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Lorsque vous traversez une procédure de divorce, la question de votre logement se pose inévitablement. Faut-il vendre le bien immobilier que vous partagiez avec votre ex-conjoint(e) ? Ou au contraire, envisager d’en acquérir un nouveau pour vous reloger ? Ces décisions engagent de lourdes conséquences financières et juridiques qu’il convient d’anticiper. Dans cet article, nous aborderons en détail les différents aspects à prendre en compte pour vendre ou acheter un logement pendant votre divorce.

En bref

Voici un aperçu des principaux points que nous développerons :

  • Déterminer la juridiction compétente pour prononcer votre divorce selon votre lieu de résidence et le règlement Bruxelles II bis.
  • Choisir la loi applicable à votre divorce grâce au règlement Rome III, en fonction de critères comme votre nationalité ou résidence habituelle.
  • Les avantages de vendre le logement familial avant le prononcé du divorce pour éviter les droits de partage.
  • Les précautions à prendre pour acheter un nouveau logement selon votre régime matrimonial (communauté, séparation de biens, contrat de mariage).
  • Le déroulement du partage des biens immobiliers après le divorce et le rôle du notaire.
  • La reconnaissance en France des jugements de divorce prononcés à l’étranger.
  • La procédure d’exécution forcée sur les biens immobiliers d’une décision de justice étrangère.
  • L’impact du divorce sur le remboursement de votre crédit immobilier.

Juridiction compétente pour le divorce

La première étape consiste à déterminer quel tribunal sera compétent pour prononcer votre divorce. Si vous résidez dans l’Union européenne, c’est le règlement Bruxelles II bis qui s’applique depuis 2005. Ce texte harmonise les règles de compétence juridictionnelle au sein de l’UE en matière matrimoniale. Deux critères de rattachement sont retenus :

  • La résidence habituelle des époux ou de l’un d’eux
  • Leur nationalité commune

Ainsi, vous pourrez saisir les tribunaux de l’État membre où vous résidez habituellement, où résidait votre famille, ou encore de l’État dont vous et votre conjoint(e) avez la nationalité. En dehors de l’UE, ce sont les règles de procédure civile française qui détermineront la compétence territoriale, en privilégiant le lieu de résidence de la famille ou, à défaut, celui de l’époux demandeur.

Choisir la loi applicable au divorce

Le règlement Rome III, entré en vigueur en 2012, permet aux couples internationaux de choisir la loi applicable à leur divorce ou séparation de corps. Cette possibilité concerne les ressortissants des 16 États membres participants, mais aussi ceux des autres pays de l’UE ou des États tiers. Concrètement, les époux peuvent désigner par une convention :

  • La loi de l’État de leur résidence habituelle au moment de la convention
  • La loi de leur dernière résidence habituelle commune, si l’un d’eux y réside encore
  • La loi de l’État dont l’un d’eux a la nationalité
  • La loi du for, c’est-à-dire celle du pays où le divorce sera prononcé
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Cette convention doit respecter certaines conditions de forme : elle doit être écrite, datée et signée par les deux époux. Des règles supplémentaires peuvent s’appliquer selon le pays, comme l’exigence d’un acte authentique par exemple. À défaut de choix par les parties, c’est une échelle de critères prévue par le règlement qui déterminera la loi applicable, en privilégiant la résidence habituelle des époux.

Vendre le logement familial avant le divorce

Dans de nombreux cas, il peut être avantageux de vendre le logement familial avant le prononcé du divorce. La principale raison est d’ordre fiscal : vous éviterez ainsi d’avoir à payer les droits de partage, une taxe représentant environ 2,5% de la valeur nette du bien. En procédant à la vente avant toute procédure, il s’agit d’un simple “partage verbal” du produit de la vente entre vous et votre ex-conjoint(e), exonéré de cette taxe.

Néanmoins, pour bénéficier de cette exonération, vous devrez faire preuve de prudence. Il ne faudra surtout pas mentionner la vente du bien ou la répartition de son prix dans votre future convention de divorce. Dans le cas contraire, l’administration fiscale considérerait qu’il s’agit bien d’un partage de biens et vous réclamerait les droits correspondants.

La vente avant divorce présente un autre avantage : elle vous permettra de régler dès à présent la question de votre logement respectif, plutôt que d’attendre l’issue de la procédure. Mais pour cela, il vous faudra vous accorder avec votre ex-conjoint(e) sur les modalités de la vente : mise en vente par une agence ou entre particuliers, estimation du bien, délais, etc. Faire appel à un professionnel de l’immobilier peut s’avérer judicieux pour éviter les tensions.

Acheter un logement selon le régime matrimonial

Si vous envisagez d’acquérir un nouveau logement pendant la procédure de divorce, vous devrez être particulièrement vigilant(e) selon le régime matrimonial qui vous lie à votre ex-conjoint(e). En effet, les règles diffèrent grandement selon que vous êtes mariés :

  • En communauté de biens : dans ce cas, tout bien acheté par l’un des époux pendant le mariage entre en principe dans la communauté, et appartient donc aux deux conjoints. Vous ne pourrez donc pas acquérir seul(e) un logement sans l’accord de votre ex-conjoint(e), sauf à recourir à des techniques particulières comme la déclaration d’emploi ou de remploi.
  • En séparation de biens : ce régime vous permet au contraire d’effectuer toutes les opérations de votre choix sans le concours de votre conjoint(e), y compris l’achat d’un bien immobilier. Vous devrez néanmoins vérifier que votre contrat de mariage ne prévoit pas une “société d’acquêts” qui viendrait limiter cette liberté.
  • Avec un contrat de mariage spécifique : si vous avez établi un tel contrat lors de votre union, ce sont les dispositions particulières qu’il contient qui régiront les possibilités d’achat immobilier pendant le divorce. Certaines clauses peuvent par exemple prévoir un rachat prioritaire des biens par l’un des époux.
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Dans tous les cas, la prudence reste de mise. Avant d’engager une acquisition immobilière en cours de procédure, il est indispensable de prendre conseil auprès d’un notaire. Celui-ci vous éclairera sur les risques juridiques et fiscaux selon votre situation personnelle.

Partage des biens immobiliers après divorce

À l’issue du divorce, il faudra inévitablement procéder au partage des intérêts patrimoniaux du couple, y compris les biens immobiliers détenus. Les modalités de ce partage dépendront une nouvelle fois de votre régime matrimonial :

  • En communauté de biens réduite aux acquêts (régime légal), les biens acquis pendant l’union devront être partagés en deux parts égales, quelle que soit la contribution financière respective des ex-époux.
  • En séparation de biens, chacun restera propriétaire des biens qu’il a acquis personnellement. Mais s’ils ont acheté ensemble un bien, ils se retrouveront dans un régime d'”indivision”, le bien devant être partagé au prorata des apports de chacun.
  • Pour un contrat de mariage spécifique, ce sont les clauses de ce contrat qui régiront le partage, dans le respect des règles d’ordre public.

Cette étape de partage des intérêts peut s’avérer complexe, d’autant qu’elle engendre des frais non négligeables (droits de partage, frais de notaire, etc.). C’est pourquoi il est vivement recommandé de recourir aux services d’un professionnel du droit, tel qu’un notaire, pour sécuriser juridiquement les opérations. Son rôle sera notamment de dresser l’inventaire des biens à partager, d’en évaluer la valeur, de répartir les actifs et les dettes selon les règles applicables, et de rédiger l’acte de partage.

Reconnaissance du jugement étranger en France

Pour les couples binationaux ou résidant à l’étranger, la question de la reconnaissance en France d’un jugement de divorce prononcé dans un autre pays peut se poser. Dans la grande majorité des cas, ce jugement produira ses effets en France sans autre formalité, dès lors qu’il a été rendu dans le respect des règles de procédure applicables.

Au sein de l’Union européenne, la reconnaissance mutuelle des décisions de justice est même automatique en vertu du règlement Bruxelles II bis. Un jugement de divorce rendu dans un État membre sera ainsi directement reconnu dans les autres pays, permettant aux ex-époux de se remarier ou de procéder à la liquidation de leur régime matrimonial en France.

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La seule étape qui pourra s’avérer nécessaire est la transcription du jugement étranger sur les actes d’état civil français, par exemple pour permettre un nouveau mariage. Mais cette formalité n’est pas automatique : elle doit être demandée par les intéressés ou transmise par les autorités étrangères, et n’a qu’une valeur informative.

Exécution forcée du jugement sur les biens

Si votre jugement de divorce prévoit des mesures sur les biens immobiliers situés en France, comme l’attribution de la propriété d’un bien à l’un des ex-époux, leur exécution sera en principe aisée. Il suffira de produire une attestation notariée visant le jugement étranger, conformément à l’article 710-1 du Code civil français. Le notaire pourra alors procéder aux formalités permettant de transférer la propriété.

En revanche, si l’un des ex-conjoints refuse d’exécuter volontairement le jugement, il faudra recourir à une procédure d’exequatur. Cette procédure, qui permet de rendre exécutoire en France une décision étrangère, est toutefois lourde et coûteuse. Elle implique notamment de produire une expédition complète du jugement, accompagnée d’une traduction officielle le cas échéant.

Pour éviter ces complications, il est donc préférable de privilégier autant que possible l’exécution volontaire et amiable des décisions de justice. Le recours à un professionnel comme un notaire permettra de sécuriser ces opérations et d’éviter tout litige ultérieur.

Conséquences sur le crédit immobilier

Lorsque le divorce implique un bien immobilier grevé d’un crédit en cours, il convient d’anticiper les conséquences sur le remboursement de cet emprunt. Plusieurs scénarios sont alors envisageables :

  • Vendre le bien : si les deux ex-époux décident de vendre, le produit de la vente servira en priorité à rembourser intégralement le crédit restant. Le solde éventuel sera ensuite partagé entre eux selon les modalités du divorce.
  • Un seul ex-époux conserve le bien : dans ce cas, il devra obtenir l’accord de la banque pour se porter seul emprunteur sur le crédit restant. L’autre ex-conjoint pourra alors se désengager du prêt. Mais le “repreneur” devra également racheter les parts de propriété de son ex-conjoint.
  • Conserver l’indivision : il est possible de rester co-emprunteurs et co-propriétaires du bien après le divorce. Mais cette solution requiert une bonne entente, chacun restant solidairement responsable du crédit auprès de la banque.

Dans tous les cas, il est indispensable d’informer votre établissement prêteur de votre situation de divorce. Celui-ci devra donner son aval aux changements envisagés sur le crédit immobilier. Des ajustements pourront s’avérer nécessaires, comme une renégociation du taux ou de la durée de l’emprunt par exemple.

Comme vous pouvez le constater, vendre ou acheter un logement en cours de divorce soulève de nombreuses questions juridiques, fiscales et pratiques. C’est pourquoi nous vous recommandons vivement de vous faire accompagner par des professionnels compétents, tels que des notaires, avocats ou conseillers bancaires. Ils sauront vous guider au mieux pour sécuriser ces opérations patrimoniales lourdes de conséquences.

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